Michel Richard, La république compassionnelle.
Grasset, mars 2006, 122 pages, 9 €
Petit livre au vitriol dénonçant la « république victimaire et lacrymale » où chaque crise donne désormais lieu à une surenchère de déclarations émotionnelles de mobilisation et de solidarité. Gouverner, ce n’est plus seulement prévoir, c’est compatir et chaque ministre se doit d’être disponible et de trouver les mots justes pour les victimes. L’auteur note que la compassion est souvent inversement proportionnelle à la part de responsabilité et qu’il est difficile de déterminer si le surcoût compassionnel est d’origine sociale ou politique : la culture victimaire est-elle ancrée dans nos représentations culturelles ou est-ce un artifice politique destiné à mieux masquer l’inertie de l’Etat : « Les premiers trouveraient chez les seconds le répondant voulu, le réconfort attendu tandis que les seconds s’achèteraient à bon prix une réputation d’humanité, marchandant leur émotion, exposant leur sensibilité pour mieux paraître bons ? » Mais, tout ceci ne serait que du registre de l’image et l’Etat « compatit mais ne traite pas, accompagne mais ne soigne pas ». Une analyse des déclarations des hommes politiques au moment de l’Erika ou des incendies de logements sociaux offre à l’auteur des formules cinglantes : « les bons sentiments ou les fortes indignations tiennent ainsi lieu de politique ». Un livre utile au moment où le pardon et l’émotion sont érigés en règles d’or de la communication de crise.