Ruth Amossy. Apologie de la polémique

PUF. 240 pages.
Si la polémique apparaît excessive, elle n’en remplit pas moins des fonctions sociales, notamment pour la formation des communautés de protestation. La polémique ne vise pas rationnellement faire triompher la vérité, mais, et tous les moyens seront bons, à faire gagner son propre point de vue sans recherche de solution de compromis. La polémique consolide l’identité d’un groupe en présentant péjorativement les autres, c’est un discours disqualifiant.
L’auteur note que la polémique ne vise pas à persuader celui à qui on s’adresse, mais un tiers ou une audience plus large : « L’allocutaire direct n’est pas l’opposant, mais le public (le tiers) invité à se rallier à la bonne cause » (p. 209). Loin d’une conception habermassienne où la communication viserait la construction de l’espace public par le dialogue, la polémique ne vise pas à aboutir à un accord, mais contribue paradoxalement à tisser du lien social.
Un livre clair, bien construit et original.

André Gaudreault et Philippe Marion. La fin du cinéma ? Un média en crise à l’ère du numérique

Armand Colin. 274 pages.
Loin d’une étude économique sur la place du cinéma, c’est un regard très académique qui est ici présenté. J’ai surtout retenu que la fin du cinéma avait été pronostiquée avec l’arrivée du parlant, puis de la télévision, du magnétoscope, puis de la télécommande, puis maintenant avec le numérique : « Le cinéma ne cesserait jamais de se voir déclarer mort. » (p. 43). L’arrivée d’opérateurs comme Netflix devait encore modifier la donne, le cinéma pourra n’être qu’un lieu parmi d’autres du visionnage d’un film que l’on regardera quand et où nous le déciderons, c’est-à-dire ATAWAD. AnyTime, AnyWhere, AnyDevice.

Ralph Tench, William Sun, Brian Jones (sous la direction de. Communicating Corporate Social Responsability

Perspectives and Practice. Emerald. 430 pages.
Volume 6 de la collection « Critical studies on Corporate Responsability, Governance and Sustainability », ce livre est composé de 18 chapitres couvrant un très grand nombre de thèmes relatifs à la communication RSE. Cet ouvrage apporte un grand nombre de réponses basées sur des résultats de recherches académiques, aux principales questions posées par la communication RSE.
Un commentaire plus détaillé a été mis en ligne sur mon blog.

Benoît DUGUAY. Consommer, consumer

Dérives de la consommation. Liber. 156 pages.
Professeur en sciences de gestion à l’université du Québec à Montréal, l’auteur propose une réflexion sur les tendances de la consommation en lien avec la problématique des responsabilités. Il prend appui sur les travaux de Lewis Mumford qui dès 1950 s’interrogeait sur le lien entre le sentiment de bien-être et les possessions, et ceux de Michel Maffesoli, auteur de l’expression « société de consumation ». Sa critique se veut mesurée « le consommateur n’est pas une victime de la société d’hyperconsommation, il en est le complice » (p. 145).

Virginie de La Renaudie et Magali Ronsmans. Communication et développement durable

Edipro. 194 pages.
Ouvrage composé de 15 chapitres écrits par des auteurs différents, le livre m’a d’abord désarçonné car il intègre des élément non usuels dans la communication responsable comme « Travailler en intelligence collective », « Sensibiliser et valoriser le personnel », « La participation communicante », mais l’idée est intéressante puisque la communication responsable questionne d’abord nos pratiques de communication, même si elles ne concerne pas l’objet RSE.
J’ai apprécié les bons articles de synthèse de Virginie de La Renaudie en introduction, celui de Mathieu Jahnich sur la publicité et de Fabien Leclercq, qui parle de son expérience de concepteur d’événements avec ses réussites et ses échecs.

Yonnel Poivre-le Lohé. De la publicité à la communication responsable

Ed. Charles Léopold Mayer. 190 pages.
J’ai eu plaisir à préfacer cet ouvrage, car même si je ne suis pas toujours d’accord avec l’auteur, le livre est passionnant. Derrière le coup de gueule contre l’envahissement publicitaire et l’auto-régulation, c’est une vraie réflexion sur une communication responsable digne de ce nom, c’est-à-dire qui s’interroge sur sa propre responsabilité. De quoi la communication est-elle responsable ? : « C’est bien la communication qui doit être responsable, indépendamment du sujet qu’elle aborde » (p. 77).
Un livre polémique dans le bon sens du terme, en plus écrit avec talent et souvent avec humour.

Stuart EWEN. La société de l’indécence. Publicité et genèse de la société de consommation

Collection ingénierie sociale. 278 pages.
Un livre de référence sur la critique publicitaire. Cet ouvrage est paru initialement en 1976 aux Etats-Unis et a été traduit en France en 2014. Il traite de la publicité comme production sociale, de l’idéologie politique de la consommation et des représentations publicitaires comme celles de la femme. En dehors du rôle de promotion de la consommation et d’un style de vie, l’essai suggère que c’est grâce à la publicité qu’une idéologie nationale se forge et que l’unité nationale se construit (ce dont je doute avec la mondialisation publicitaire)
Le livre regorge d’exemples de vieilles publicités pour inciter les femmes à être belles « La vie moderne prive les femmes de leurs couleurs naturelles » (1924), ou pour réussir dans la vie avec du savon « Il faut du temps et du courage pour arriver tout en haut, alors rendez-vous vers la route plus facile avec du savon et de l’eau ».

Edouard Rencker. La pub est morte. Vive la communication

L’Archipel. 220 pages.
L’auteur part des récentes études sur la perception des discours d’entreprise et de leur faible crédibilité pour présenter une réflexion sur les pistes permettant de modifier nos conceptions traditionnelles de la communication. E. Rencker préconise une communication authentique qui puisse dépasser les vieux principes de communication apparus dans les années 80. J’ai apprécié les réflexions sur le brand content, le story telling et les conséquences du big data. L’ouvrage est aussi très concret et pédagogique, comme lorsqu’il présente les sept facteurs de la force d’une marque, les cinq moteurs de l’authenticité, les sept éléments d’une construction d’image, et c’est toujours clair. En plus, qu’un consultant arrive à une synthèse opérationnelle sans tomber dans la dérive classique de la promotion de son agence, c’est assez rare pour être souligné.

Assaël Adary, Jean-Jacques Salomon. Les 100 premiers jours d’un( e) Dircom

Sport ou marathon ?. Editions du Palio 192 pages.
Basé sur une quinzaine d’interviews de dircoms ayant récemment pris leur nouveau poste, le livre s’intéresse à cette période majeure du démarrage de la fonction. Bien construit autour de quelques grands thèmes, chaque chapitre présente une synthèse du sujet, des verbatims d’entretien, un mini débat entre les deux auteurs et le compte rendu d’une interview.
J’ai retenu l’ampleur des sollicitations des prestataires durant ces 100 premiers jours, l’importance de vite marquer son territoire, de se faire accepter en interne par des visites sur le terrain, de l’aide qu’apporte l’évaluation pour renforcer l’image de professionnalisme et l’importance de l’engagement dans une démarche de nouveau plan de communication afin de montrer les nouvelles inflexions.

Valérie Lépine, Fabienne Martin-Juchat et Christelle Millet-Fourrier (sous la direction de). Acteurs de la communication des entreprises et organisations. Pratiques et perspectives

PUG. 270 pages.
Une bonne surprise tant les ouvrages de chercheurs en sciences de la communication sont rares sur ce sujet. Un des thèmes centraux est la prédominance des pratiques issues du marketing dans la pratique de communication des organisations. Parmi les sujets examinés, l’évolution de la communication publique vers une logique du global ; la communication responsable dont la publicité s’oriente vers du publi-reportage « ou au contraire adapte une épuration linguistique » souvent liée à un visuel, et des audiovisuels où se dégage une impression de lenteur ; la communication des universités vers une logique de marque. Le chapitre relatif aux formations professionnelles note que les sciences de la communication ont peu investi le champ de la communication commerciale, celui sur la communication interne qu’il s’agit de « de relier les individus plutôt que de relayer l’information ». (p. 188).

Un bon livre de réflexion malgré de nombreuses erreurs et approximations.