Thierry Portal et Christophe Roux-Dufort, Prévenir les crises. Ces Cassandre qu’il faut savoir écouter

Armand Colin. 320 pages.
Constitué de vingt-huit points de vue d’experts venant de tous horizons, cet ouvrage est consacré aux signaux faibles en tant qu’annonciateurs de crises. Le haut niveau des intervenants sollicités (Karl Weick, Patrick Lagadec, Elie Cohen, Nassim Nicholas Taleb, …) et la diversité de leurs points de vue rend ce livre passionnant, même si l’on aurait apprécié une synthèse finale. Loin de se lancer dans une apologie du signal faible, le livre en montre toute la complexité et comme le disent les responsables du projet : « Il est ainsi toujours plus aisé d’attribuer des signes préalables à un événement dont on connaît ou redoute le résultat final. » (p. 15),
Je recommande.

Philippe Muray. Causes toujours

Editions Descartes / La Montagne. 128 pages.
Chroniques publiées dans le journal La Montagne entre 2000 et 2006 (date de son décès). C’est Célinien, réactionnaire et jouissif et superbement écrit.
Le livre traite de téléréalité, du tribunal pénal international, de l’euro, de la censure, des USA, de Paris Plage, de la cigarette, des abus de langage, du rôle des médias, du réchauffement climatique et bien sûr de la festivité.

Antoine Compagnon. Un été avec Montaigne

Ed. France Inter. 170 pages.
Recueil de 40 courts chapitres correspondant aux 5 minutes qu’avait quotidiennement Antoine Compagnon l’an dernier sur France Inter pour nous parler de Montaigne. Chaque chapitre part d’un extrait des Essais, le replace dans le contexte de l’époque et de la vie de Montaigne et évalue sa pertinence actuelle. Les malentendus du langage, l’instabilité du monde, la lecture, l’amitié, la culture, le paraître, la sexualité, et bien d’autres sujets.
J’ai trouvé cette citation que je ne connaissais pas : « Il fallait s’enquérir qui est mieux savant, non qui est plus savant. Nous ne travaillons qu’à remplir la mémoire, et laissons l’entendement et la conscience vide […]. Nos pédants vont pillotant la science dans les livres, et ne la logent qu’au bout de leurs lèvres, pour la dégorger seulement, et mettre au vent. » (p. 95).
Montaigne est décidément bien moderne.

Frank LESTRINGANT. André Gide. L’inquiéteur

Tome II. Flammarion.1.530 pages.
On ne ressort pas complétement indemne de ce genre de lecture ; celle-ci m’a pris deux années en comptant la lecture du premier tome l’an dernier. Au total c’est pas loin de 2.700 pages au rythme d’une demi-heure trois ou quatre fois par semaine. Je reste sceptique sur le personnage et guère incité à lire son œuvre. Mais quelle personnalité singulière, et quelle histoire dans la vie intellectuelle de la France. Un personnage détestable par ses mœurs, contrasté par ses prises de position, mais libre, audacieux et ne reniant rien.Ce livre qui retrace les débuts de la NRF (et le refus de publier Marcel Proust), la dénonciation du colonialisme, l’attrait puis la condamnation du communisme, la posture des intellectuels durant la guerre, est passionnant.

Benjamin Rosoor. Agir sur l’e-reputation de l’entreprise

Eyrolles. 152 pages.
Clair, bien documenté et opérationnel, une bonne référence sur le sujet. J’ai apprécié la réflexion sur les différences de traitement de l’information entre bloggueur et journaliste avec l’idée que le bloggueur intègre davantage dans son choix l’expérience qu’il va vivre, parfois avant l’intérêt de l’information. De même, l’auteur observe bien les différences des réputations potentielles en fonction des réseaux sociaux et la nécessité d’une présence permanente, même le week-end. « sur les réseaux sociaux, 48-72 h sans réponse, c’est une éternité » (p. 31). Beaucoup de bonnes idées, notamment sur la place du juridique, sur les alliances, sur « l’effet Jack Daniels ».

Christine Balagué et David Fayon, Facebook, Twitter et les autres

Pearson, 2ème édition, 2012.
Un très bon livre sur la communication digitale avec une bonne présentation du contexte, des différents réseaux et des enjeux soulevés. L’ouvrage est aussi intéressant à titre personnel que pour une organisation. Ayant lu ce livre en 2013, je me suis aperçu de l’extraordinaire rapidité d’évolution des données d’une année à l’autre.

Harmut Rosa. Aliénation et accélération

La Découverte. 152 pages.
Sous-titré « Vers une théorie critique de la modernité tardive », ce livre est paru en 2010 avant d’être traduit en français en 2012. Il est une synthèse de l’ouvrage de base d’Harmut Rosa Accélération, une critique sociale du temps. L’auteur analyse la structure temporelle de nos sociétés et introduit le concept d’aliénation dans la théorie critique contemporaine. Dans l’idée que « Tout va de plus en plus vite », H. Rosa distingue l’accélération technique, celle du changement social et celle du rythme de vie. Il met en relation la nouvelle configuration sociale due aux réseaux sociaux : « Notre voisin peut être pour nous un parfait étranger, alors qu’une personne située à l’autre bout du monde peut être notre partenaire le plus intime » (p. 60). Le lien entre l’accélération et la performance politique est convaincant.
Un livre parfois ardu, mais important.

Joël de Rosnay, Surfer la vie

Comment sur-vivre dans la société fluide, éditions LLL, 256 pages.
L’auteur part de l’image du surf, pour analyser les mouvements contestataires, les francs-maçons, la sur-information, l’autorité et ceux qu’il nomme des « douceurs », à savoir des personnes qui se situent entre le DIY et l’innovation. On n’y apprend pas grand chose, on est parfois étonné par des observations qui semblent se contredire comme l’attention à l’environnement et une charge virulente contre le principe de précaution qui paralyserait toute prise de risque, mais cela reste une belle réflexion, notamment sur les conséquences d’Internet sur nos modes de raisonnement et plus globalement la vie sociale.

Marc Martin. Les pionniers de la publicité

Aventures et aventuriers de la publicité en France (1836-1939). Editions Nouveau Monde. 368 pages.
Critique du livre (.doc)

Laurent Habib. La force de l’immatériel – Pour transformer l’économie.

PUF. 70 pages. Grasset. 348 pages.
Petit ouvrage de poche pour plaider la cause du capital immatériel que l’auteur chiffre jusqu’à 80% de la valeur pour certaines entreprises comme le secteur du luxe, des spiritueux ou de la pharmacie. Selon l’Observatoire de l’immatériel, il existerait 10 familles d’actifs immatériels, dont bien évidemment le capital marque.
On a du mal à suivre l’auteur lorsqu’il déclare qu’une «Communication fondée sur les actifs immatériels permet de passer de la culpabilité à l’optimisme, du passé au futur» (page 46) et que les actifs immatériels nous font «entrer dans l’ère capitaliste aux mécanismes plus vertueux».