Le jour du dépassement

Il ne suffit pas d’informer pour convaincre, ni d’alerter pour sensibiliser.
En ce jour toujours plus rapproché du jour du dépassement, quelques rappels des sciences de la communication:

 

 

Le jour du dépassement est tombé, cette année c’est donc le 1er août.

Rappelons que cet indicateur mesure la capacité de régénération de notre planète. Plus précisément, il indique la date annuelle à partir de laquelle nous puisons dans les ressources terrestres sans que notre planète ne puisse absorber les impacts environnementaux négatifs.

L’indicateur apparaît fiable, il repose sur un calcul relativement simple mettant en parallèle notre empreinte environnementale face à la capacité de régénération des écosystèmes.

Le plus surprenant avec cet indicateur repose sur l’observation d’une formidable réduction de la date. Conçu à l’origine en 1986 au 31 décembre, nous sommes aujourd’hui au 1er août, après un très court répit lors de la crise Covid.

De nombreux dispositifs ont été construits pour mesurer nos impacts et nous alerter. Le corollaire de la méthode du Global footprintpermet de connaître le nombre de planètes optimal. Pour la France, puisque le jour du dépassement est tombé cette année le 3 mai, cela signifie qu’il faudrait trois planètes si l’ensemble de la population mondiale vivait comme les Français.

Avec la réduction régulière du jour de dépassement, chaque nouvelle année illustre toujours davantage les dégradations environnementales.

 

 

AVEC QUEL EFFET? 

C’est la question centrale, les alertes se multiplient et les diagnostics sont toujours plus inquiétants. Pourtant rien ne bouge, du moins pas assez vite et surtout pas à la hauteur des nécessaires bifurcations.

Il faut déjà ne pas se concentrer sur les outils ; ce n’est pas en remettant en cause un thermomètre qu’on supprime la maladie. La méthode du jour du dépassement est contestable, mais elle a le mérite de fournir une occasion médiatique d’interpellation.

A chacun ensuite de se saisir des résultats pour engager des débats. De l’horloge de l’apocalypse qui indique que nous sommes à une minute et 30 secondes avant la fin du monde, au jour du dépassement et du nombre de planètes qu’il nous faudrait, chaque indicateur a le mérite d’un symbolisme fort, apte à la médiatisation.

Tous les chercheurs en sciences de la communication savent qu’il ne suffit pas d’informer pour convaincre, comme il ne suffit pas d’alerter pour sensibiliser. La communication climatique s’est trop longtemps cantonnée à un discours alarmiste, technique, informationnel, incantatoire, lointain et souvent moralisateur.

 

 

On sait désormais que la peur à elle seule n’est pas un levier de mobilisation. Il est urgent d’arrêter de nous fixer des objectifs lointains comme l’obtention de la neutralité carbone en 2050 afin de pouvoir rester sous les 2 degrés en 2100. Il est surtout nécessaire de ne pas se tromper de combat et de ne pas confondre les objectifs et les moyens. Il est préférable de mettre l’accent sur le modèle de société que nous souhaitons. L’idéal de société sur lequel nous pouvons tous nous retrouver est fait d’une meilleure qualité de vie, de produits plus sains, d’un air plus respirable, d’un mode de vie moins stressant.

La lutte contre le dérèglement climatique est un moyen au service d’un idéal collectif et d’un futur désirable. Si nous considérons que l’essentiel de la lutte doit s’effectuer par la réduction des émissions de CO2, comment s’étonner que la mobilisation stagne et parfois régresse alors que le péril n’a jamais été aussi proche. Arrêtons de placer la neutralité carbone au frontispice de l’avenir radieux de notre humanité.

Les recherches en sciences de la communication climatique sont de plus en plus reconnues et à travers elles les questions de tonalité communicationnelle, d’ouverture aux imaginaires et aux nouveaux récits de la transition écologique. C’est un signe d’espoir.