Les lignes bougent sur l’obsolescence programmée
Alors que le phénomène était connu depuis les années 30, ce n’est que depuis le début des années 2010 que l’obsolescence programmée a émergé sur la sphère publique. Après le vote le 17 octobre 2013, de l’avis du Comité Economique et Social Européen, premier texte européen sur le sujet et pour lequel j’avais eu la chance d’être désigné rapporteur, force est de constater que le combat a bien progressé.
La situation en France
En France, après la proposition de loi déposée en mars 2013 par le sénateur EELV Jean-Vincent Placé, le vote de la loi Hamon le 18 mars 2014, le nouveau dépôt d’une proposition de loi cette fois à l’Assemblée Nationale le 22 octobre 2014, c’est le vote le 22 juillet 2015, de la loi sur la transition énergétique qui statue sur le sujet. Ce texte fournit une définition : « L’obsolescence programmée se définit par l’ensemble des techniques par lesquelles un metteur sur le marché vise à réduire délibérément la durée de vie d’un produit pour en augmenter le taux de remplacement » et prévoit des sanctions lourdes de deux ans d’emprisonnement et de 300.000 € d’amende. La loi prévoit également que « les expérimentations peuvent être lancées sur la base du volontariat, sur l’affichage de la durée de vie des produits. »
En dehors de l’espace politique, le Laboratoire National d’Essais, après une étude publiée en 2014, va s’engager à l’automne sur l’expérimentation d’un label portant sur deux secteurs d’activité.
L’Agence Française de Normalisation (AFNOR) réfléchit quant à elle à la faisabilité d’une norme pouvant s’inscrire dans le cadre plus large d’une normalisation relative à l’économie circulaire. Le fonds de dotation de la normalisation a débloqué ce premier semestre un budget permettant de mieux connaître le changement éventuel de comportement du consommateur face à l’affichage de la durée de vie des produits.
Le Conseil National de la Consommation a publié le 12 mai 2015 un avis sur la durabilité des produits visant à renforcer l’information du consommateur et à agir en faveur de la réparabilité des produits.
Une nouvelle association, Halte à l’obsolescence programmée, présidée par Laetitia Vasseur, ancienne collaboratrice parlementaire de Jean-Vincent Placé, va être lancée à la suite de la reconnaissance du délit d’obsolescence programmé par la loi. Le site web halteobsolescence.org sera mis en ligne le 20 août pour fédérer les initiatives sur le sujet.
Le think tank, la Fabrique Ecologique, lance un groupe de travail que j’aurai le plaisir de présider. La première réunion se déroulera le 14 septembre 2015 et le rapport final est attendu pour le printemps 2016.
La situation en Europe
Au plan européen, le Comité Economique et Social Européen, dont le mandat de cinq ans se termine le 21 septembre, organise un grand événement de fin de mandat à Bruxelles, le 7 septembre, où le sujet sera mis à l’honneur. Dans sa feuille de route, le nouvel Etat président de l’Union Européenne, le Luxembourg, a inscrit la lutte contre l’obsolescence programmée dans ses objectifs, et le CESE européen a renouvelé son appel à une action sur le sujet pour la feuille de route européenne de 2016. Ce même Comité Economique et Social Européen a débloqué en juin 2015 un budget de 25.000 Euros pour permettre des études sur le sujet. Les résultats de celles-ci seront publiés en décembre 2015.
Côté Parlement Européen, le député EELV Pascal Durand a déposé une demande de résolution au Parlement Européen devant déboucher en fin d’année après la présentation d’un rapport final attendu pour fin novembre. Une conférence sur le thème s’y déroulera le 21 octobre afin de recueillir des contributions en amont du rapport d’initiative. De son côté, le Bureau Européen de l’environnement organise une journée sur le sujet le 30 septembre prochain. La Commission Européenne semble, elle, un peu en retard.
Tout ceci indique que le sujet de la consommation durable est désormais solidement installé. On peut regretter en France que l’aboutissement dans le texte de loi soit nettement en-dessous des espoirs, mais il faut reconnaître que la ministre de l’écologie, Ségolène Royal, a réussi à faire reconnaître législativement la lutte contre l’obsolescence programmée là où le précédent ministre de la consommation, Benoît Hamon, avait reculé.